Les origines du mot « Pahouin » et la migration des Fang en Afrique centrale
publié le : 3 octobre 2025 à 04h32min | MàJ : il y a 4 heures
Rédacteur : La rédaction de Rue241

Le mot « Pahouin » fait son apparition en 1819 et constitue la première appellation européenne du peuple Ekang, plus connu sous le nom de Fang. Ce terme, transmis aux Européens par les Myènè, a rapidement circulé parmi les explorateurs et administrateurs coloniaux. Mais son histoire linguistique révèle à quel point les contacts entre peuples locaux et colonisateurs ont façonné les dénominations identitaires.
De Pamouay à Pahouin : une évolution linguistique
Le mot d’origine, Pamouay , a été repris par les Espagnols qui l’ont transformé en Pamue , puis par les Allemands qui ont opté pour Pangwe . Enfin, les Français ont choisi Pahouin , adaptant le son à leur propre système phonétique. Cette appellation, largement diffusée dans les récits coloniaux du XIXe siècle, est devenue la désignation commune du peuple Fang auprès des Européens.
Bien avant l’adoption de ce nom, un autre terme existait déjà : Mpgangwe . Employé par les Mpongwè de l’estuaire, il signifiait littéralement « je ne sais pas » en langue locale, sans doute en réponse aux interrogations des premiers explorateurs sur l’identité des populations venues de l’intérieur.
La migration des Fang : du nord au sud
Les Fang appartiennent au grand ensemble bantou. Leur migration les aurait conduits, à partir du sud du Cameroun et de la vallée du Ntem, vers les forêts denses du Gabon, de la Guinée équatoriale et du Congo-Brazzaville. Les chercheurs estiment que ces mouvements ont eu lieu entre le XVIIe et le XIXe siècle, sous la pression de conflits internes, de la recherche de nouvelles terres agricoles et de la traite esclavagiste.
Ces déplacements ont façonné une implantation progressive. Aujourd’hui, les Fang représentent une composante majeure de la population gabonaise, mais leur présence dépasse largement les frontières nationales : on les retrouve dans cinq pays d’Afrique centrale — Gabon, Cameroun, Guinée équatoriale, Congo-Brazzaville et même au sud du Tchad.
Une identité multiple mais partagée
Le terme « Pahouin », bien que forgé dans le contexte colonial, rappelle cette histoire de circulation et d’adaptation culturelle. Il regroupe en réalité une mosaïque de clans et de sous-groupes (Nzaman, Essandone, Mvaï, Mvaé, etc.) qui partagent la même langue et des traditions communes, marquées notamment par le culte du bwiti , la valorisation des ancêtres et un sens fort de la solidarité lignagère.
Aujourd’hui, la mémoire de cette appellation coloniale demeure, mais elle tend à être réappropriée dans une perspective historique. Le peuple Fang, souvent désigné comme l’un des plus influents d’Afrique centrale, continue de revendiquer son unité et son rôle dans la construction des États modernes de la région.