Soudan : face à la nouvelle flambée de choléra, l’ONU appelle à une action urgente
publié le : 24 août 2024 à 06h41min | MàJ : 24 août 2024 à 06h49min
Rédacteur : Gabon Matin
Alimentée par les inondations et le manque d’eau, d’hygiène et d’assainissement dans les camps de déplacés et les communautés hôtes, une nouvelle vague de choléra est en cours au Soudan, et la flambée de choléra a été déclarée le 12 août 2024.
Un mois après le signalement des premiers cas suspects, 658 cas et 28 décès ont été signalés dans cinq États, avec un taux de létalité élevé de 4,3 %, a indiqué vendredi l’Agence sanitaire mondiale de l’ONU ( OMS ). Parmi ces cinq États, Kassala rapporte le plus grand nombre de cas (473), suivi de Gedaref (110) et d’Al Jazirah (51), tandis que Khartoum et River Nile rapportent moins de cas.
Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), ces cas ne sont pas liés à la précédente épidémie de choléra qui avait été déclarée en septembre 2023. « Elle s’est techniquement terminée en mai 2024 après qu’aucun cas n’ait été signalé pendant deux périodes d’incubation consécutives », a précisé depuis Port-Soudan, le Dr Shible Sahbani, Représentant de l’OMS au Soudan, lors d’un point de presse régulier de l’ONU à Genève.
Sur le terrain, l’OMS travaille en étroite collaboration avec les ministères de la santé de l’État fédéral et des États pour coordonner la riposte à l’épidémie de choléra. L’Agence onusienne a ainsi prépositionné des kits de choléra et d’autres fournitures médicales essentielles dans les États à haut risque en prévision des risques associés à la saison des pluies.
Plus de 455.000 doses de vaccins mobilisées
« Ces fournitures contribuent à relancer la réponse à l’épidémie dans tous les États touchés, y compris dans des États comme Khartoum et Al Jazirah qui sont difficiles d’accès en raison de problèmes de sécurité », a ajouté le Dr. Sahbani.
Une campagne de vaccination orale de trois jours contre le choléra s’est achevée hier jeudi dans deux localités de l’État de Kassala. Il s’agit de localités qui ont signalé un nombre élevé de cas. « Nous avons déployé 51.000 doses de vaccins oraux contre le choléra (VOC) dans le but d’atteindre 97 % de la population éligible dans ces localités », a détaillé le Dr. Sahbani.
La campagne de vaccination orale contre le choléra est menée parallèlement à la campagne de vaccination orale contre la polio, et une campagne d’immunisation multiantigénique est en cours de préparation pour les Darfour.
Dans le même élan, l’OMS apporte un soutien technique, opérationnel et financier à la campagne et soutient les préparatifs en vue de soumettre au Groupe international de coordination pour l’attribution des vaccins (GIC) une demande de doses de vaccins pour mener une deuxième campagne dans d’autres localités.
La bonne nouvelle est que le GIC a pleinement approuvé la demande d’un total de 455.000 doses pour mettre en œuvre une campagne de vaccination réactive ciblant la population à haut risque non vaccinée dans l’État de Kassala.
Le plan d’intervention sanitaire pour 2024 financé à plus de 40 %
Pour renforcer la prise en charge des cas, l’OMS met en place 10 centres de stabilisation - 2 dans chaque État touché - et 48 points de réhydratation orale (ORP) pour faciliter l’accès gratuit des communautés touchées aux sels de réhydratation orale (SRO) qui leur sauveront la vie.
Afin de lancer et de maintenir une réponse robuste à l’épidémie de choléra, l’OMS et ses partenaires, ainsi que les travailleurs de la santé, ont besoin d’un accès sûr et sans entrave à toutes les zones touchées. L’agence onusienne a également besoin d’un soutien financier durable pour faire face aux besoins sanitaires croissants découlant des maladies, de la malnutrition, des risques naturels tels que les fortes pluies et les inondations, et des menaces directes de la guerre.
Huit mois après le début de l’année, le plan d’intervention humanitaire pour 2024 n’est financé qu’à 37 % et la réponse sanitaire à 42 %.
Des épidémies de rougeole, de dengue, de paludisme, de méningite et de polio
Outre cette nouvelle flambée de choléra, le Soudan fait actuellement face à des épidémies de rougeole, de dengue, de paludisme et de méningite, ainsi que de poliomyélite. Au moins 12 des 18 États du Soudan connaissent simultanément trois épidémies ou plus.
Le paludisme est l’une des principales causes infectieuses de morbidité et de mortalité au Soudan. Entre le 4 novembre 2023 et le 12 juillet 2024, plus de 1,67 million de cas ont été signalés dans 15 États. Au total, 173 décès ont été signalés dans six États.
La dengue reste un fardeau sanitaire majeur dans le pays. Du 15 juillet 2023 au 19 juillet 2024, 9.396 cas ont été signalés dans 12 États. Au cours de la même période, 73 décès ont été signalés dans neuf États.
L’épidémie de rougeole qui touche actuellement le Soudan a commencé à la fin de l’année 2023. Au 12 juillet 2024, 4.937 cas ont été signalés dans 14 États. Au total, 109 décès ont été signalés dans 14 États. Certaines parties du Soudan se trouvent dans la « ceinture de la méningite », où l’on enregistre les taux les plus élevés de maladies à méningocoques dans le monde. Entre le 15 avril 2023 et le 2 août 2024, 155 cas ont été signalés dans 10 États, avec 20 décès associés.
Cinq réfugiés parmi les morts du choléra notés dans l’État de Kassala
De son côté, le Haut-Commissariat de l’ONU pour les réfugiés ( HCR ) prévient que cette nouvelle vague de choléra au Soudan, la deuxième depuis le début de la guerre il y a seize mois, menace les communautés déplacées à travers le pays.
La propagation de la maladie dans les zones accueillant des réfugiés, principalement dans les Etats de Kassala, Gedaref et Jazirah, est particulièrement préoccupante. En plus d’accueillir des réfugiés d’autres pays, ces États abritent également des milliers de Soudanais déplacés qui ont cherché à se mettre à l’abri des hostilités en cours.
À ce jour, 119 cas de choléra ont été confirmés dans trois sites de réfugiés de l’État de Kassala, selon le ministère soudanais de la santé.
« Malheureusement, cinq réfugiés sont décédés après avoir contracté la maladie. Bien que des cas de choléra aient été signalés dans l’État de Gedaref, aucun réfugié n’a été touché à ce jour par l’épidémie, mais nous continuons à surveiller la situation », a déclaré Kristine Hambrouck, Représentante du HCR au Soudan.
Contexte alarmant de malnutrition et de risque de choléra dans les pays voisins
De l’autre côté des frontières du Soudan, notamment au Soudan du Sud et au Tchad, les équipes du HCR ont signalé une augmentation des cas de paludisme dans les sites de réfugiés, provoquée par le début de la saison des pluies. « Cette situation s’inscrit dans un contexte alarmant de malnutrition, de rougeole, d’infections respiratoires aiguës, de diarrhée aqueuse aiguë et de risque d’épidémie de choléra », a fait valoir Mme Hambrouck.
Depuis le début du conflit au Soudan, plus de 10,3 millions de personnes ont été chassées de chez elles et se sont réfugiées ailleurs au Soudan ou dans les pays voisins. La situation humanitaire et le niveau de financement étant déjà précaires avant cette dernière épidémie de choléra, des fonds sont désespérément nécessaires pour soutenir la fourniture de soins de santé et d’autres aides vitales.
Il s’agit notamment de développer les centres de traitement du choléra et d’autres établissements de santé, de renforcer le personnel de santé et d’augmenter les stocks de fluides intraveineux et de médicaments.