Tchad : le manque de fonds entrave l’aide aux réfugiés soudanais
publié le : 14 mars 2024 à 20h55min | MàJ : 14 mars 2024 à 21h07min
Rédacteur : Gabon Matin
Alors que le Programme alimentaire mondial (PAM) s’empresse de prépositionner des vivres avant la saison des pluies, l’aide apportée par l’ONU aux milliers de Soudanais ayant trouvé refuge dans l’est du Tchad voisin est menacée par le manque croissant de fonds.
Selon le PAM à Rome, les programmes de distribution de vivres s’arrêteront dans quelques semaines en l’absence d’un financement urgent. Pour assurer un soutien continu aux personnes touchées par la crise au Tchad au cours des six prochains mois, l’agence onusienne basée PAM a besoin d’urgence de 242 millions de dollars.
« Nous sommes engagés dans une course contre la montre. La petite fenêtre permettant de prépositionner des fournitures se referme rapidement et notre financement s’épuise à ce moment dramatique », a averti le Représentant du PAM au Tchad.
« Nous avons déjà réduit nos opérations dans des proportions qui auraient été impensables il y a seulement quelques années, laissant des personnes affamées au bord de la famine », a précisé Pierre Honnorat.
La route transfrontalière vers le Darfour menacée
Cette alerte du PAM intervient alors que des milliers de réfugiés soudanais continuent d’affluer du Darfour et que la saison des pluies menace de couper l’accès routier aux livraisons humanitaires dans les camps de l’est du pays, où près d’un million de réfugiés soudanais ont trouvé refuge.
Le PAM s’empresse d’acheter, de transporter et de prépositionner suffisamment de stocks dans l’est du Tchad pour approvisionner à la fois sa réponse aux réfugiés et ses opérations transfrontalières au Darfour pendant la saison des pluies qui verra les routes devenir impraticables et les rivières de boue jonchées de camions bloqués. Mais sans financement adéquat, cela sera impossible.
Faute de fonds, l’aide sera suspendue pour 1,2 million de réfugiés soudanais.
La route transfrontalière d’approvisionnement en produits de première nécessité vers le Darfour, la seule route fiable vers l’ouest du Soudan en proie à des difficultés, est également menacée. Cette route a permis au PAM de venir en aide à un million de personnes au Darfour depuis le mois d’août, et l’agence prévoit d’augmenter son aide pour atteindre un million de personnes par mois.
Le PAM contraint de supprimer en avril toute aide aux nouveaux réfugiés
Le PAM est aux prises avec une crise financière catastrophique au Tchad et a déjà procédé à des coupes sombres. En avril, l’agence onusienne sera contrainte de supprimer toute aide aux nouveaux réfugiés soudanais.
Depuis des mois, la majorité des réfugiés du Cameroun, de la République centrafricaine et du Nigeria n’ont reçu aucune aide en raison du manque de fonds.
La baisse des rations alimente la concurrence entre les réfugiés, les rapatriés et les communautés d’accueil pour des ressources déjà rares, semant ainsi les germes du conflit et de l’instabilité.
« Les retombées de la crise au Soudan submergent la réponse humanitaire au Tchad, qui est sous-financée et surchargée. Nous avons besoin des donateurs pour éviter que la situation ne devienne une catastrophe totale », a averti M. Honnorat.
Dix mois après l’éclatement du violent conflit au Soudan, près de 560.000 réfugiés soudanais et 150.000 rapatriés tchadiens sont entrés au Tchad, qui accueille désormais plus d’un million de réfugiés, ce qui en fait l’une des populations de réfugiés les plus importantes et à la croissance la plus rapide d’Afrique.
Le Tchad décrète l’état d’urgence alimentaire
La majorité des réfugiés traversent la frontière en portant le fardeau des traumatismes, de la faim et des horribles récits de violence. Ils dépendent entièrement de l’aide humanitaire des agences onusiennes pour survivre.
Les évaluations du PAM montrent que la consommation alimentaire est préoccupante ou à la limite de l’acceptable pour 90 % des nouveaux réfugiés, 77 % des réfugiés préexistants et 67 % des communautés locales dans l’est du pays. La situation nutritionnelle est particulièrement préoccupante : 40 % des enfants réfugiés soudanais de moins de cinq ans souffrent d’anémie grave.
Par ailleurs, le Tchad est également confronté à sa cinquième année consécutive de crise alimentaire, avec une faim aiguë record qui devrait toucher 2,9 millions de personnes pendant la période de soudure de juin à août, qui coïncide avec la saison des pluies.
Dans ce contexte, le gouvernement a déclaré en février une urgence alimentaire et nutritionnelle, soulignant ainsi l’urgence de la situation.